Karst Architecture

CAMERA OBSCURA


cabane de vignes cinématographe

construction d’un cabanon intégralement en matériaux de réemploi, adaptée à la projection cinématographique.

lieu: Vigneux-de-Bretagne / 44
type: construction neuve
MOE: KARST architecture mandataire
MOA: privée
mission: mission complète + EXE + auto construction
surface: 12 m2 SHON
coût travaux: 1 000 € HT
calendrier: livré 2018
publications: Maison & Travaux no 290, juillet / août 2018, p. 118-119

La replantation d’une petite vigne dans le bien nommé Vigneux-de-Bretagne a été l’occasion d’édifier un petit bâtiment. La construction devait à la fois satisfaire l’usage immédiat d’abri de rangement et de repos ponctuel, tout en offrant la possibilité extensive d’y séjourner lors d’une nuit douce ou étoilée.

Sur ce chantier envisagé pour ainsi dire sans budget, la seule solution était une démarche expérimentale, utilisant exclusivement des matériaux de réemploi. Leur intégralité est issue du d’un rayon géographique proche. Cet effort d’approvisionnement nous a permis de limiter les dépenses essentiellement à la quincaillerie et aux membranes d’étanchéité, concrétisant un projet dont la valeur se constitue en dehors de l’économie habituelle du bâtiment. Nous avons ainsi formalisé progressivement le dessin, dans un aller-retour permanent entre matériaux disponibles et intentions architecturales.

Le défi consistait donc à réaliser, à micro échelle, un petit habitat temporaire confortable et désirable. Notre réponse matérialise un gabarit inscrit dans une emprise au sol limitée, 3 sur 4 mètres, mais cherchant son volume à la verticale. Les ouvertures du rez-de-chaussée sont volontairement limitées à la porte d’entrée vitrée et à une baie fixe horizontale, encadrant la vue sur toute la longueur du bureau. À l’étage, en revanche, le regard en surplomb parcourt librement la vigne, les champs et les bois alentour. Après nous être hissés sur une mezzanine, en passant sous le chéneau du toit inversé, nous sommes saisis sans transition par la force immersive du paysage qui se découpe à travers une baie coulissante, sur toute la largeur et la hauteur du mur au sud-ouest. Sur le mur d’en face, des vitrages fixes permettent la vue traversante sur toute la largeur intérieure.

Répondant au souhait d’agrémenter les songes des quelques nuits d’été, le volume a été réfléchi afin qu’à la baie vitrée de l’étage puisse aisément se substituer un écran, éclairé de l’intérieur par une vidéoprojection inversée, pour un visionnage en plein air. À la tombée du jour, le bâtiment s’apparente ainsi à une camera obscura à l’échelle surprenante d’un micro habitat. La vision panoptique qui glisse de l’intérieur vers l’extérieur se trouve ainsi singulièrement renversée par un dispositif architectural de concentration optique qui projette, en retour, la lumière de son propre œil de camera. La nuit venue, c’est le monde des images qui émane ainsi, à travers le cinématographe, vers le dehors, défiant le pittoresque sur son propre terrain — c’est-à-dire ce qu’il offre au regard, littéralement : ce qui peut être peint, sur une toile comme sur une pellicule.

retour